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dimanche 1 juin 2014

Les relations entre la France et l’Afrique : la dialectique du maître et du valet

Après « Comment la France a perdu l’Afrique », « Sarko en Afrique », écrits avec Stephen Smith, et « Ces Messieurs Afrique : Des réseaux aux lobbies », Antoine Glaser revient une nouvelle fois sur les relations entre la France et son pré-carré dans son nouvel opus : AfricaFrance. Quand les dirigeants africains deviennent les maîtres du jeu.  L'auteur le dit lui-même « je suis devenu, à mon corps défendant, un spécialiste de la « Françafrique » (p.11) ». Nous vous proposons ici une recension de son ouvrage.
Dans AfricaFrance, l’ancien directeur de La Lettre du continent, souhaite déconstruire « l’histoire communément admise » d’un continent soumis à la France. Selon lui c’est « un leurre qui arrange autant Paris que les capitales africaines (…) loin d’être des pantins et des béni-oui-oui, les présidents africains ont su manœuvrer et instrumentaliser leurs « maîtres » à Paris » (p.12-13). Il va même plus loin, ça n’est pas qu’un simple retournement mais une situation qui préexistait déjà sous le Général de Gaulle. L’objectif d’Antoine Glaser est donc de mettre la lumière sur ces manipulations qui ne proviendraient pas toujours de ceux qu’on croit : « les dirigeants africains jonglent ainsi avec les non-dits pour que leurs interlocuteurs gaulois se sentent toujours responsables de leur avenir (…)[ils] se trouvent plus souvent qu’on ne le croit dans une position dominante vis-à-vis du pouvoir français (…) il considèrent [la France] avec la condescendance du « qui paie commande »» (p.17-18).
De l’influence essentielle de Jacques Foccart et de Felix Houphouët-Boigny, « le patron de la Françafrique », au financement des partis politiques, en passant par les réseaux d’influence parisiens (communicants, hommes d’affaires et politiques) activés par les président africains « pour asseoir leur pouvoir en Afrique » (p.41), ou encore le rôle de la franc-maçonnerie, des réseaux de « l’or noir » au Congo et ceux de l’or jaune au Niger, Antoine Glaser décrypte en dix chapitres le passage de la Françafrique à l’AfricaFrance. Chaque chapitre est consacré à l’une des anciennes colonies françaises. L’auteur revient ainsi sur l’arrivée au pouvoir de l’ivoirien Alassane Ouattara et son soutien à l’opération française au Mali, les relations parfois difficile entre François Hollande et Idriss Déby, le président tchadien, les initiatives du président burkinabé qui relèvent « plus souvent qu’on ne le pense de sa propre initiative » et ne sont pas « téléguidées par Paris ». En effet, pour Antoine Glaser « Blaise Compaoré  sait que la France a plus besoin de lui qu’il n’a besoin de la France. En termes d’aide financières, il compte bien plus sur Taïwan que sur l’Hexagone » (p.146). Antoine Glaser analyse aussi la politique du gabonais Ali Bongo plus tournée vers les Etats-Unis que celle de son père. On peut regretter que Djibouti ne soit que rapidement mentionné en conclusion alors même que ce petit Etat de la Corne de l’Afrique illustrerait parfaitement la thèse de l’auteur (p.213).
Les initiés apprécieront les nombreuses anecdotes et les coulisses des relations entre les présidents africains et le pouvoir français dans la période récente (et jusqu’à fin 2013). L’ouvrage est agrémenté d’entretiens des acteurs de ces relations, comme Anne Lauvergeon, Patricia Balme, André Bailleul, Jean-Marc Simon, Michel Roussin, Michel Katz, Georges Serre, Michel de Bonnecorse, Jean-Christophe Rufin, Pierre-André Wiltzer, Robert Bourgi, etc.
Ainsi, malgré les promesses rééditées de ruptures, tant François Hollande que son prédécesseur auraient été « marabouté[s] par l’Afrique et ses dirigeants » (p.209). Le président français serait parfois « l’obligé » de certains présidents africains car « celui qui paie commande ». Antoine Glaser conclue sur les perspectives économiques et les richesses du continent africain qui attirent déjà de nombreux Etats. Il finit par asséner: « Paris n’est plus le donneur d’ordres, mais il ne le sait pas encore. Il se croit encore aimé alors qu’il n’intéresse plus. L’Afrique a changé sans que son « papa » autoproclamé en soit informé » (p.215) or comme l’aimait à le rappeler l’ancien président gabonais Omar Bongo : « La France sans l’Afrique, c’est une voiture sans carburant » (p.42).
A lire d'une traite !

Quelques interviews de l'auteur : 

lundi 21 janvier 2013

Génaf : des jeunes au service de la solidarité internationale pour et avec l'Afrique


Génaf est une association créée en 2003 qui se donne pour objectif de participer au développement de l'Afrique de l'Ouest. Good Morning Afrika (via Bénédicte, l'une des membres de l'association) vous propose une interview croisée de Sarah Monnier, l’actuelle présidente de Génaf, de Grégoire Mialet, son ancien président et de Lauren Kharouni, chef du projet 2013.

 Olympiade avec les enfants

Comment est née cette association ? Depuis quand l'association existe-t-elle ?
Grégoire Mialet :
L’association Génaf existe depuis 2003. Elle est née de la volonté de plusieurs jeunes en France de se structurer pour organiser des projets solidaires en collaboration avec des jeunes africains.
Le cœur de notre fonctionnement repose sur notre indépendance qui nous permet une totale liberté d’action : laïque, apolitique et totalement autonome, l’association se veut un trait d’union entre tous les milieux sociaux afin de proposer à tous les jeunes qui désirent s’investir un espace d’expression et d’engagement solidaire.

Comment l'association est-elle organisée ? Quels sont les rôles de chacun ?
 Grégoire Mialet :
La taille de notre association nous permet de mettre en place une organisation clairement définie tout en conférant une certaine flexibilité dans le déroulé de nos actions. Ainsi, comme beaucoup d’associations, nous sommes régis par des statuts et par un règlement intérieur et les principales décisions sont validées par un conseil d’administration de six personnes. Néanmoins, nous tenons à investir chaque bénévole dans un rôle (événementiel, gestion des dons, organisation des activités pédagogiques, organisation d’un tournoi de sport, etc.) afin de le rendre acteur du projet et sommes sensibles au travail collaboratif et participatif plutôt qu’un fonctionnement hiérarchique pyramidal.
Il est important pour nous que chaque bénévole perçoive la touche personnelle qu’il peut apporter dans nos projets. Le rôle de l’association est de l’accompagner dans ses idées et ses prises d’initiatives.

Sarah Monnier :
Oui, par exemple, pour le choix du futur projet, nous avons beaucoup discuté des propositions qui nous avaient été faites entre bénévoles, puis, à partir des informations à notre disposition, nous avons pu, entre membres du conseil d’administration, faire le choix du meilleur projet à adopter. Nous tenons à ce que chaque bénévole puisse agir à sa manière, comme il le souhaite et surtout à hauteur de ses envies et de ses possibilités.


 Communauté rurale de N'Gogom

Qui sont vos bénévoles ? Pourquoi s'engagent-ils ?
 Sarah Monnier :
Les bénévoles de Génaf sont plutôt jeunes : nous avons entre 18 et 32 ans. Nous sommes étudiants, salariés, chômeurs, chefs d'entreprise, dans tous les secteurs. Certains s'engagent pour découvrir une autre façon de voyager et de découvrir les cultures africaines, d'autres pour participer à un projet qui leur semble juste et qui leur permet de mener une action solidaire. Quelques-uns encore y trouvent un excellent tremplin vers une professionnalisation dans le domaine de la solidarité internationale. 

Grégoire Mialet :
Cette diversité des parcours, des formations et des personnalités de nos bénévoles constitue la richesse de notre association et cimente les actions que nous organisons.

Comment arrivez-vous à mesurer l'impact de vos projets ?
   Grégoire Mialet :
Le suivi de nos projets est un point auquel nous accordons une attention très particulière. L’efficacité même de notre action dépend de notre capacité à faire en sorte que la population locale s’approprie les structures que nous avons mises en place et les systèmes organisationnels que nous avons proposés. Aussi, nous cherchons toujours à valider l’utilisation de ces structures plusieurs mois, voire plusieurs années après notre venue. Cela se matérialise par de nouveaux séjours sur place (en plus petit comité) et/ou par un suivi régulier avec nos partenaires.
Nous cherchons notamment à mesurer le plus précisément possible le nombre d’enfants touchés par les structures éducatives mises en place : salles de classes, espace numérisé, bibliothèque… Nous vérifions que les populations bénéficiaires correspondent aux populations que nous ciblons et notamment, que la parité garçon/fille est respectée. Ensuite, nous essayons de tracer le volume d’accès (nombre de livres prêtés, nombre de connexions) grâce au travail précieux de nos partenaires. Si ces processus peuvent se révéler complexes et coûteux en énergie, ils sont notre garantie d’une action efficace, cohérente et concertée.

 Le chantier

Quel est le prochain projet que vous allez mener ?

Lauren Kharouni :
Pour son cinquième projet, Génaf interviendra, à l’été 2013, dans le centre-est du Burkina Faso, dans la région de Koupéla. Le projet consiste à participer au développement d’un collège-lycée agricole situé en région rurale dans le village de Lioulgou en partenariat avec une association locale, à l’initiative du projet.
Sur place, les matinées des bénévoles seront consacrées à la construction d’un laboratoire, en partenariat avec un entrepreneur burkinabé. Les salles de classe étant déjà construites, et les terrains disponibles pour les cultures, la salle de laboratoire est indispensable à l’enseignement technique que souhaite prodiguer l’établissement. Semblable à une salle de chimie, cet espace permettra aux élèves de mener à bien des expériences, d’entreprendre des expérimentations sur les cultures et de comprendre, de manière pratique et concrète, l’ensemble du cycle productif agricole. Les après-midi seront, elles, dédiées aux activités culturelles organisées avec les enfants, en coopération avec une association de jeunes et des institutrices du village.

Good Morning Afrika traite des questions géopolitiques et stratégiques liées aux continent africain. Dans quelle mesure le travail mené par Génaf peut-il être rattaché à ces problématiques ?
Grégoire Mialet :
Depuis sa création, Génaf cherche à montrer avec humilité que les actions locales des petites associations ont autant d’importance que les programmes internationaux gérés par les gouvernements ou les grandes ONG : par leur connaissance du terrain, par leurs contacts proches de la population, par leur implication vertueuse, par leur diversité et leur multiplicité, ces associations mettent en place des projets simples mais adaptés dans des zones souvent non concernées par les programmes nationaux ou internationaux.
La complémentarité des acteurs qui travaillent pour le développement est un atout considérable qu’il nous faut savoir utiliser. Cela passe évidemment par un meilleur dialogue ainsi que par une volonté commune de toujours chercher à comprendre les besoins et les intérêts locaux.
Enfin, notre action doit être durable et, à ce titre, les acteurs qui interviennent dans ces pays (gouvernements, entreprises, exploitants, ONG, associations) doivent oser mettre en place des solutions innovantes, respectueuses de l’environnement, des droits humains et des traditions. C’est ce que Génaf, à son échelle, s’attachera à faire dans les projets à venir.

Lauren Kharouni :
Le travail de Génaf concerne la coopération. Ainsi, nos projets se doivent d’être en parfaite adéquation avec les besoins, contraintes et potentialités du territoire sur lequel nous intervenons. Cette adéquation est recherchée tant au niveau local des villages où sont menés les projets qu’à une échelle plus grande par l’intégration dans les axes de politique nationale pour s’assurer de la pérennité et l’efficacité du projet. La dimension géopolitique et stratégique de notre travail repose sur le choix de prioriser l’éducation et la formation, puisque lorsque celles-ci font défaut, cela a un impact sur le développement social et économique, les flux migratoires et les conflits.
La dimension géopolitique et stratégique du projet Burkina 2013 réside d’une part dans sa volonté d’une revalorisation de la ruralité et du travail agricole. D’autre part, il s’inscrit dans une stratégie de lutte contre l’insécurité et la dépendance alimentaires. En effet, le secteur primaire est au cœur de l'économie burkinabé. Or, la production de de produits destinés à l’exportation est privilégiée au détriment des cultures vivrières. De plus, les rendements agricoles sont très faibles, notamment du fait de techniques agraires nuisant à la fertilité des sols. Le manque de formation en est l’une des causes, et c’est par ce biais que Génaf a choisi d’agir. La question alimentaire soulève non seulement la question des ressources - produire plus et mieux - mais également des questions sociales - réduction des inégalités - et politiques - éviter les conflits. L'agriculture est ainsi un moteur de développement indéniable et est, de fait, au cœur des enjeux géopolitiques actuels.

Pour en savoir plus :
le site : ICI
le blog : ICI
la page Facebook : ICI

lundi 21 mai 2012

L'Afrique en blogs

Nouvelle sélection de blogs sur le continent :



- Géopolitique de la Corne de l'Afrique ICI de Said Ismael

- Afrique défense : ICI  par un historien Jean François Auran


 - Cahiers nomades : ICI 



- Les Echos du Bénin : ICI

- Abidjan sur le pouce : ICI

- Concerne about Africa : ICI

- Amadou Amath Blog sur le Sénégal ICI

Communiquez nous le nom de votre blog !

dimanche 13 mai 2012

Sortie du 3ème numéro de Jambo

Le Comité "Afrique" de l'ANAJ-IHEDN vient d'annoncer la sortie du numéro 3 de la revue Jambo.

Au sommaire de ce numéro :
 -Élections présidentielles au Sénégal
- Le bilan africain du 6ème forum mondial de l’eau
- Mali : la chute d’un acteur clé de la lutte contre AQMI
- Focus pays : Le Malawi
- La coopération industrielle internationale
- Interview M. Xavier DRIENCOURT, Ambassadeur de France en Algérie - La Francophonie est-elle morte ?
- Faire des affaires dans les États membres de l’OHADA
- En Somalie, le temps est compté…
- PUBLICATION—REVUE Léonard Vincent, Les Erythréens  

Télécharger le numéro 3 de Jambo ICI

Rédigée par des étudiants, chercheurs ou jeunes professionnels membres du Comité Afrique de l’ANAJ-IHEDN, la lettre souhaite montrer à ses lecteurs que le continent africain est un acteur à part entière des enjeux géopolitiques mondiaux. Nos rédacteurs ont une expérience du continent, y ont vécu ou travaillé. Il s’agit pour eux de faire partager leur intérêt commun pour un continent trop souvent marginalisé dans les médias et la pensée européenne.

Pour recevoir gratuitement la lettre tous les trimestre, par mail, envoyez nous un mail à : afrique@anaj-ihedn.org

De même n’hésitez pas à nous proposer vos contributions ou des sujets d’étude que vous souhaiteriez voir traiter : afrique@anaj-ihedn.org

jeudi 29 mars 2012

Nouveaux blogs

Nous vous proposons une nouvelles fois une liste de nouveaux blogs :

- L'Afrique en face de Vincent Hugueux, l'auteur de "Les Sorciers Blancs, Enquête sur les faux amis français de l'Afrique", et "L'Afrique en face: dix clichés à l'épreuve des faits".



- Le blog d’Israël Yoroba Guebo, un ivoirien, dont le dernier billet décrivant un touriste est criant de vérité !

-Sénégal Médias qui indique être le premier blog des TIC au Sénégal

- Puisque qu'on parle beaucoup de Kony en ce moment, suivez Rosebell's Blog écrit par une journaliste ougandaise

 - Et un site, de recherches en relations internationales : Noria

Nous remercions Philippe Chapleau qui, sur son incontournable blog Lignes de défense, diffuse l'annonce pour la conférence organisée le 5 avril par l'ANAJ-IHEDN et l'Institut Choiseul sur la Corne de l'Afrique. Vous pouvez encore vous inscrire ICI

mercredi 29 février 2012

Sénégal : les premiers enseignements de la présidentielle

Thierry Garcin recevait hier Michel Raimbeaud (ambassadeur de France) dans les enjeux internationaux



Résumé de l'émission



"Le Sénégal était un havre de paix, il a versé dans la violence de rues et les affrontements stériles depuis des mois. De fait, forte contestation de la candidature de l’actuel président Abdoulaye Wade, qui cherche par un biais constitutionnel très contesté à obtenir un troisième mandat, après avoir songé à son fils comme possible successeur.

Comment se présente le paysage politique, quelles sont les forces en présence, pourquoi une telle dérive de l’exécutif, quel regard porter sur l’opposition, quel rôle de la jeunesse (éduquée et mobilisée), quel poids accorder au Mouvement du 23-juin ? Et, bien sûr, quelles premières leçons au lendemain du premier tour, dans un contexte africain perturbé ?"

Réécoutez ICI

lundi 12 décembre 2011

Pluralisation religieuse entre éclatement et concurrence

A lire dans le dernier numéro de Politique Africaine coordonné par Maude LASSEUR et Cédric MAYRARGUE :




Résumé de l'éditeur : " Depuis une vingtaine d’années, l’Afrique connaît une explosion de la religiosité qui se traduit par une multiplication spectaculaire des manifestations de la foi : les nouvelles Églises chrétiennes fleurissent à tous les coins de rue, les grandes confréries islamiques se voient concurrencées par de puissants courants réformistes, de nouvelles croyances se développent en s’appuyant sur des cultes néotraditionnels ou des mouvements transnationaux. La concurrence peut parfois produire de violents conflits, comme au Nord-Nigeria. Comment interpréter cette explosion religieuse qui prend l’allure d’un véritable mouvement social ?
Ce dossier propose une analyse de ces dynamiques religieuses contemporaines sous l’angle de la pluralisation, analysée comme un double processus d’éclatement de l’offre et des pratiques cultuelles, mais aussi d’interactions renouvelées entre acteurs religieux. Il pointe les logiques d’emprunt et de mimétisme qui amènent des mouvements à s’inspirer de leurs concurrents, mais aussi les stratégies de distinction, nécessaires pour s’imposer dans un univers compétitif, qui peuvent parfois susciter des tensions. À partir d’études de cas portant sur des mouvements chrétiens, musulmans ou d’origine asiatique au Sénégal, au Bénin, en Côte d’Ivoire, au Nigeria et à Madagascar, ce volume éclaire ainsi d’un nouveau jour les fils complexes qui se nouent ou se dénouent entre forces religieuses en situation de pluralisme."


Sommaire : ICI

lundi 11 octobre 2010

Afrique de l'Ouest : géopolitique sous-marine

Un peu de géopolitique sous-marine en parlant des plateaux continentaux qui ne sont pas délimités et font l’objet de conflits pour l’instant seulement juridique. C’est une politique presque archaïque dans le sens où les pays se disputent pour conquérir des territoires. Pour l’instant tout se passe dans l’indifférence car l’exploitation des ressources n’est pas à l'ordre du jour mais qu'en sera t-il demain ?
Il y a quelques jours le Cap-Vert, la Gambie, la Guinée-Bissau, la Guinée, la Mauritanie et le Sénégal ont donc signé un accord, sous l'égide de la Norvège, pour fixer leurs zones maritimes, potentiellement riches en pétrole et gaz. Cet accord vise à éviter des conflits futurs. Les six pays devront soumettre au plus tard début 2012 leurs propositions aux Nations unies, conformément à la convention sur le droit de la mer de 1982, pour l'extension de leur plateau continental au-delà de la zone des 200 milles nautiques (370 km).


Bref rappel juridique:
La Convention des Nations Unies sur le droit de la mer (UNCLOS) du 10 décembre 1982(ou Convention de Montego Bay,) est l’un des traités internationaux les plus importants qui réglementent le droit de la mer. Plus de 150 Etats sont parties à cette Convention. L’un de ses apports les plus importants est la réglementation des droits de souveraineté et de la juridiction en mer, et la définition des zones maritimes.

- La territorialisation des espaces maritimes :
o Eaux intérieures (toutes les eaux du côté continental de la ligne côtière sous la compétence d’un État côtier)
o Mer territoriale (jusqu’à 12 milles marins)
o Zone contiguë (de 12 à 24 milles marins)
o Zone économique exclusive (de 12 à 200 milles marins)
o Plateau continental (de 12 à 200 milles marins, mais peut s’étendre plus loin dans certaines circonstances)
o Haute mer (la zone au-delà de la limite extérieure du plateau continental d’un État côtier)
En cas d’Etats se faisant face une zone étroite, c est la ligne médiane d’équidistance qui doit être appliquée.

- Les facteurs de délimitation
o Juridiques : Depuis la Convention de Montego Bay, les Etats côtiers avaient obtenu le droit d’exploiter les ressources naturelles sous-marines jusqu’à 200 milles nautiques de leur littoral (370km). Donc jusqu’au plateau continental.
o Géographiques : Les géographes considèrent que le plateau continental est une entité géographique (pas que juridique) avec une définition précise : prolongement physique du territoire sous la mer. Et que fait-on si ce prolongement physique dépasse les 200 milles ?

L’article 76 de l’UNCLOS énonce une formule complexe pour déterminer la limite extérieure du plateau continental d’un État au-delà des 200 milles marins. Cette définition dépend de l’épaisseur des roches sédimentaires, qui sous-tend l’idée que le plateau est le prolongement naturel du territoire terrestre d’un État. La limite maximale est de 350 milles marins à partir des lignes de base, ou de 100 milles marins à partir de l’isobathe de 2 500 mètres, la distance la plus grande l’emportant.
Exceptions liées au plateau continental
Si le plateau continental d’un État côtier s’étend au-delà des 200 milles marins à partir des lignes de base, l’État doit communiquer l’information scientifique, technique et juridique relative aux limites de son plateau continental à la Commission des limites du plateau continental, un organisme des Nations Unies créé aux termes de l’UNCLOS. La Commission fera ses recommandations à l’État côtier en ce qui a trait à l’établissement de ses limites extérieures. Cette extension ne peut toutefois pas dépasser la limite des 350 milles (648 kilometres) et ne concerne pas les ressources halieutiques
Les Etats qui ont ratifie la convention après 1999 doivent déposer leur dossier au plus tard dix ans apres la date de sa ratification
Il est prévu qu’au bout de 12 ans d’exploitation l’Etat côtier verse des royalties à hauteur de 7% de la valeur de la production annuelle à un fonds de l’ONU

mardi 14 septembre 2010

L'islamisation de l'Afrique nous réserve de mauvaises surprises

Bernard Squarcini, directeur de la DCRI, dans une interview à Politique Internationale (n°127) : "En 15 ans, malgré les efforts des différents service et malgré la coopération internationale, l'islamisme militant a gagné de nouveaux pays : le Nord du Mali (où se sont installées les katibates sahéliennes d'AQMI qui ont dû fuir Alger sous la pression militaire et policière), le Niger, la Mauritanie, et, depuis peu, le Sénégal. Dans 15 ans, le danger sera peut être descendu encore plus au Sud (...). L'islamisation progressive de l'Afrique Noire nous réserve de mauvaises surprises (...) Dans les pays de la zone sahelo-saharienne, et en général dans les zones de djihad, l'enlèvement de ressortissants français - journalistes, membres d'ONG, expatriés...- est une réalité préoccupante."

dimanche 7 mars 2010

Les "émeutes de la faim" au Sénégal : Un puissant révélateur d'une défaillance de gouvernance




"Les "émeutes de la faim" au Sénégal : Un puissant révélateur d'une défaillance de gouvernance" par Alain ANTIL, chercheur à l'Ifri (mars 2010). Téléchargez le document : ICI


"L’expression « émeutes de la faim », qui a été utilisée lors des manifestations de la fin 2007 / début 2008 dans une trentaine de pays dans le monde, dont une majorité de pays africains, rassemble des phénomènes de nature très différente d’un pays à l’autre. Nous nous attacherons dans cette note à revenir sur le cas du Sénégal, pays où les « émeutes » ont été nombreuses. Une rapide recension des différentes « manifestations » de mécontentement qui ont secoué ce pays laisse apparaître, entre autres, la faillite d’un secteur agricole qui, bien qu’employant presque 60 % de la population active, n’arrive pas à nourrir la population sénégalaise. Un tel constat invite à s’interroger sur les causes structurelles, qui ne peuvent être réduites à des raisonnements économiques. Bien vite, la défaillance de gouvernance apparaît dans tout sa béance : accoutumance aux importations, structure monopolistique de l’importation de certains produits, sacrifice des populations rurales pendant des décennies pour s’assurer de prix raisonnables pour les consommateurs urbains, bien plus redoutés par le pouvoir. Les blocages ne sont pas toujours là où on les croit."
Carte :Les émeutes de la faim dans le monde (2007-2008). F. Damato

Alain Antil est responsable du programme Afrique subsaharienne à l'Ifri

jeudi 11 février 2010

L'Afrique et les biocarburants



Une véritable « biocarburant-mania » est en train de se répandre en Afrique depuis la forte poussée de fièvre du baril de pétrole en 2008.
Au Sénégal, le président Abdoulaye Wade, qui se veut le champion africain des biocarburants, a révélé, le 28 décembre dernier dans son adresse à la nation à l’occasion du Nouvel An, que la production de biocarburants a bien démarré dans le pays avec la mise en valeur de 10 000 hectares de jatropha, un arbre originaire du Brésil très présent dans les pays sahéliens, où il est plus communément appelé pourghère ou bagani, et dont les graines non comestibles produisent une huile aux propriétés comparables à celles du diesel. « En faisant planter par chaque communauté rurale 1000 ha, nous aurons 3 210 000 tonnes de jatropha, soit 1,134 million de litres de biodiésel, correspondant à notre indépendance énergétique », a notamment précisé le chef d’Etat sénégalais.
Selon les statistiques de la Commission de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA), « la filière sucre de l’espace UEMOA représente un marché potentiel de 570 000 tonnes pour une production réelle de 330 000 tonnes, un chiffre d’affaires de 120 milliards de francs CFA par an. Elle emploie directement 28 000 personnes, représentant une masse salariale de 30 milliards de francs CFA par an, une valeur ajoutée de 65 milliards de francs CFA par an et une contribution au budget de Etats de l’ordre de 26 milliards de francs CFA annuellement ».
L'Afrique du Sud autre pays en pointe sur le continent pour la promotion de cette nouvelle énergie grâce au géant Ethanol Africa, voit désormais grand et envisage l’ouverture de huit usines de bioéthanol en 2010. Ethanol Africa compte aussi investir en Angola, en Zambie, en Tanzanie et au Mozambique pour produire du biocarburant à partir du maïs et de la canne à sucre. De son côté, le Burkina lorgne de plus en plus les biocarburants. La première unité de production de biodiesel à base de graines de jatropha devrait prochainement voir le jour à Kossodo, à l’initiative du chef traditionnel Larlé Naba.

Au Mali, le jatropha, appelé également « l’or vert du désert », est exploité depuis deux ans dans la production de biodiesel.
Au Zimbabwe, qui fut pionnier en Afrique en matière de production des biocarburants issus de la canne à sucre dès le début des années 80, les regards se tournent aussi vers le jatropha, avec la plantation de 60 000 hectares l’an passé. Transload, une unité de fabrication d’agro-carburants implantée près de Harare, produit également depuis 2008 du biodiesel à partir de graines de coton, de soja et de tournesol.

L’Ile Maurice concentre ses efforts sur la canne à sucre tandis que le Cameroun produit déjà son biocarburant à partir de l’huile de palme. Le Nigeria s’est, quant à lui, lancé dans la production de bioéthanol à partir du manioc. Au total, une trentaine de pays africains produisent déjà des agro-carburants, selon l’Association africaine des producteurs de biocarburants (AAPB), née en novembre 2006 à Ouagadougou en marge d’un atelier sur le développement de la filière biocarburants dans l’espace UEMOA. Selon les experts, l’engouement africain pour les agro-carburants s’explique essentiellement par la volonté de réduire la dépendance énergétique et, accessoirement, par le souhait de créer des emplois dans le milieu rural. « Les pays africains qui misent sur les biocarburants sont majoritairement attirés par les perspectives d’allègement de la facture énergétique et de création d’emplois », explique Joël Blin, bio-énergéticien, responsable du laboratoire Biomasse-énergie et biocarburant (LBEB) au Burkina Faso. Mais, s’il est vrai que la majorité des pays africains produisent des biocarburants pour les besoins du marché intérieur, il n’en demeure pas moins que quelques-uns d’entre eux exportent déjà cette énergie vers le Nord. Le groupe sucrier soudanais Kenana a, pour la première fois le 27 décembre dernier, exporté 5 millions de litres d’éthanol d’une valeur de 3,3 millions de dollars vers l’Union européenne. « Quatre autres cargaisons, de 5 millions de litres chacune, doivent encore partir pour l’UE d’ici la fin février 2010 », révèle Majdi Hassan, directeur des ventes du groupe, cité par l’AFP. Le Soudan emboîte ainsi le pas à l’Ile Maurice et au Zimbabwe, qui exportent depuis quelques années du biodiesel vers le marché communautaire.



Qu’ils soient destinés au marché intérieur ou à l’export, les biocarburants font, depuis 2008, année marquée par des émeutes de la faim dans plusieurs pays africains, l’objet de vives critiques sur le continent. Au Sénégal, le Conseil national de concertation et de coopération des ruraux (CNCR) a dénoncé avec véhémence le programme national des biocarburants, qui ne constitue pas, selon lui, « une priorité pour le monde rural ». Une étude sur les biocarburants au Sénégal, publiée début 2009 par les ONG Wetlands International et Action-aid, a estimé que le développement des biocarburants pourrait à terme menacer les cultures vivrières et ouvrir la voie à une compétition dangereuse entre les 800 millions d’automobilistes et les 2 milliards d’humains qui vivent sous le seuil de pauvreté dans le monde. Une autre étude menée par des ONG et intitulée « Jatropha, un piège socioéconomique pour le Mozambique » a également révélé que les jatrophas du Mozambique ont été majoritairement plantés sur des terres arables. Conséquence de cette forte mobilisation : la 2e Conférence internationale sur les biocarburants, tenue du 10 au 12 novembre dernier à Ouagadougou (site de la conférence, synthèse des présentations ICI), a reconnu explicitement la responsabilité directe des biocarburants dans la crise alimentaire et recommandé le lancement de politiques d’autosuffisance alimentaire en parallèle aux stratégies de développement des agro-carburants.
Les agro carburants (biocarburants) sont des substituts à l’essence : l’éthanol est fait à partir de la canne à sucre, de betterave ou de blé ; et des substituts au diesel : huiles faite à partir de colza, soja, huile de palme. Le bilan énergétique de l’éthanol à partir du blé est faible. Le bilan des huiles de colza comme substitut au diesel est un peu meilleur.

Notes :Les agro carburants représentent 1% des terres cultivables du monde mais sur des marchés comme le maïs, l’ambitieux programme américain d’éthanol qui utilise ¼ de la production américaine contribue significativement à la hausse des prix . Les Etats-Unis représentent 40% de la production mondiale (la production d'éthanol croît de 15 à 20 % par an depuis 2002) mais ils sont utilisés aussi de manière importante au Brésil avec la production d’éthanol de canne à sucre et en Allemagne (colza pour le diesel). L'Espagne et la Pologne ambitionnent aussi de développer une capacité de production d'éthanol, à partir des céréales, afin de respecter les objectifs communautaires d'incorporation de biocarburants sans recourir aux importations.
Lire : Les biocarburants en Afrique de l'Institut de Coopération au Développement Economique et Social : ICI

Sources : Les Afriques / Walid Kéfi / Le Gouriellec

lundi 21 décembre 2009

Le sommet Africités s’est achevé hier



Tous les trois ans, les principaux décisionnaires politiques et économiques des villes d’Afrique se réunissent au sein des sommets AFRICITES. Avec le soutien de nombreuses organisations internationales, le sommet constitue le plus grand forum pour discuter et identifier les besoins des collectivités africaines.

DEMARCHE :A la suite de la 2° Conférence des Nations Unies pour les établissements humains organisés en juin 1996 à Istanbul, la communauté internationale a consacré les thèmes de la décentralisation, du partenariat et de la participation comme une des options essentielles pour promouvoir des établissements humains viables et durables. Istanbul a été également un moment fondateur du mouvement mondial des collectivités locales puisqu’à cette occasion s’est tenue la première assemblée mondiale des villes et autorités locales qui a recommandé la mise en place d’une « Coordination des Associations Mondiales des Villes et Autorités Locales » (CAMVAL) pour leur permettre de parler d’une même voix sur la scène internationale.

Le Partenariat pour le Développement Municipal a pris une part active à ce mouvement en organisant les Premières Journées de la commune africaine (Africités 98), à son initiative et à la demande des associations nationales des villes et autorités locales en janvier 1998 à Abidjan (Côte d’Ivoire). L’institutionnalisation de cette manifestation, à la demande des participants à Africités 98 a conduit à en faire un de ses programmes d’intervention.

OBJECTIFS
- proposer et animer une coopération et une plate-forme de dialogue entre les collectivités locales africaines et leurs partenaires sur le processus de décentralisation.
- Participer à la structuration et à la consolidation du mouvement municipal africain.
- Contribuer à inscrire la décentralisation dans l’agenda des instances politiques panafricaines.

SOMMETS
-Africités 98, Abidjan, en janvier 1998, premières journées de la commune africaine a marqué l’émergence du mouvement municipal africain et a constitué une des meilleures plates-formes de dialogue jamais organisée sur le continent africain autour des questions relatives aux politiques de décentralisation, au rôle des collectivités locales dans la gestion du développement urbain et dans la promotion du développement local, aux rapports entre décentralisation, développement et démocratie dans le contexte actuel et futur de l’Afrique.
-Africités 2000, à Windhoek, en mai 2000 a été avec la création du Conseil des Communes et Régions d’Afrique, le Sommet de l’unification du mouvement municipal africain et de l’affirmation du rôle stratégique des villes et collectivités locales comme acteurs incontournables du développement durable de l’Afrique. Ce sommet a été l’occasion d’un dialogue approfondi sur le financement des collectivités locales africaines. Au cours de ce sommet la décision a été prise de créer la CADDEL la conférence ministérielle africaines de la décentralisation et du développement local.
-Africités 2003, à Yaoundé en décembre 2003, consacrera l’unification du mouvement municipal africain et sa participation au mouvement municipal mondial. Ce sommet a pour ambition de situer la décentralisation et le renforcement des collectivités locales dans la perspective de mieux assurer l’accessibilité des populations aux services de base pour l’amélioration de leurs conditions de vie.
-Africités 2006, à Nairobi, en septembre 2006, sur le thème « Construire des coalitions locales pour la réalisation effective des Objectifs du Millénaire pour le Développement au sein des collectivités locales africaines ».
- Africité 2009, à Marrakech du 16 au 20 décembre 2009 sur le thème ”La réponse des collectivités locales et régionales d’Afrique à la crise globale : promouvoir le développement durable et l’emploi”. Le Cinquième Forum panafricain des collectivités locales a enregistré la participation de quelque 4600 participants venus de plus de 40 pays d’Afrique.

Exemples de Prix Africités 2009

-Prix de la décentralisation : Royaume du Maroc
-Prix de la bonne gouvernance locale : Lusaka (Zambie)
-Prix de la bonne gouvernance participative : Dondo (Mozambique)
-Prx de l’assainissement : Antananarivo (Madagascar)
-Prix de la santé de base : Kigali (Rwanda)

-Africités 2012
se tiendra à Dakar
En 2000, les collectivités africaines se sont dotées d'une coordination à Windhoek en Namibie, avant de lancer en 2005, Cités et gouvernements locaux unis d'Afrique (CGLUA) à Tshwane en Afrique du Sud.

lundi 9 novembre 2009

Sommet sino-africain : retour sur les principales mesures



Le Sommet sino-africain à Charm el-Cheikh s’est achevé lundi en présence de responsables de plus de 50 pays africains. Le premier ministre chinois Wen Jiabao a promis plus de 10 milliards de dollars de prêts bonifiés (6,6 milliards d’euros) à l’ensemble du continent africain et fait des offres de bons offices pour « la paix et la sécurité », tout en réfutant les accusations de « néo-colonialisme » portées par les Occidentaux.
Les ministres et chefs de délégations ont adopté la "Déclaration de Charm el-Cheikh», qui insiste sur la nécessité de maintenir l'unité et le soutien mutuel pour faire face aux défis résultant de la crise économique mondiale, et le « Plan d’action triennal de Charm El-Cheikh (2010-2012) ». Les deux documents définissent de nouvelles actions visant à promouvoir la coopération sino-africaine dont :
-un projet de mise en place d’un partenariat Chine-Afrique pour gérer la question des changements climatiques figure au nombre de ces mesures.
-un renforcement de la coopération avec l’Afrique dans le domaine des sciences et de la technologie
-une aide à l’Afrique à consolider ses capacités de financement en accordant dix milliards de dollars de crédits concessionnaires aux pays africains
-un soutien aux institutions financières chinoises pour leur permettre de créer un crédit spécial d’un milliard de dollars pour les PME africaines.

Les deux parties ont également convenu d'organiser le second dialogue politique entre les ministres des Affaires étrangères de la Chine et d'Afrique en 2010 en marge de l'Assemblée générale des Nations Unies.
La Chine va davantage ouvrir ses marchés aux produits africains pour lesquels, elle pourrait progressivement appliquer un tarif nul à 95% des produits en provenance des pays africains moins développés, entretenant des relations diplomatiques avec Pékin, une mesure qui s’appliquera dès 2010, à 60% de ces produits.



Je vous propose de changer de perspective et de s’interroger sur les perceptions africaines de la Chine en Afrique.
La Chine connaît un boom économique et dispose d’une diaspora importante dans le monde entier y compris en Afrique. Elle est le premier fournisseur de l’Afrique et son deuxième client après les Etats-Unis. Pourtant, si on connaît la stratégie chinoise envers l’Afrique notamment à travers un Livre Blanc publié en janvier 2006 et intitulé : « Politique de la Chine à l’égard de l’Afrique » on ne connaît pas véritablement la perception qu’a l’Afrique de la Chine. La présence chinoise offre de nombreuses opportunités aux gouvernements africains malgré une relation largement au bénéfice des Chinois.

I. La présence chinoise : une opportunité pour les dirigeants africains…

a)Une diplomatie de non-ingérence très appréciée.


L’une des raisons majeures du bond spectaculaire de la Chine en Afrique est que la Chine fonde ses relations avec les pays africains sur le principe de la non-ingérence dans les affaires intérieures, quitte à faire fi des exigences démocratiques. En effet, la Chine ne s’implique pas dans la résolution des conflits et peut apparaître comme une alternative pour les pays sommés, par la communauté internationale, d’adopter une gouvernance démocratique et plus transparente. Son engagement politique en faveur du Soudan (refus de voter la condamnation de l’ONU pour violation des Droits de l’homme, par exemple), s’explique par les accords économiques que la Chine a conclu au Soudan, notamment dans le domaine pétrolier et dans l’exploitation des mines d’or. Une situation quasi similaire existe avec le cas du Zimbabwe, avec qui la Chine maintient des relations diplomatiques et commerciales. Peu avant le sommet de Charm el-Cheikh les pays occidentaux avaient critiqué la Chine d’avoir signé un accord portant sur plus de 7 milliards de dollars (4,6 milliards d’euros) sur cinq ans pour un projet minier en Guinée, moins de deux semaines après le massacre de plus de 150 sympathisants de l’opposition guinéenne par les forces de sécurité.
Les pays d’Afrique, notamment ceux touchés par les guerres, ont besoin du soutien de la Chine notamment en équipements militaires et de son appui en tant que membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU. Ainsi la Chine est soupçonnée d’avoir utilisé le Soudan début 2000 comme débouché pour sa technologie militaire. Les ventes d’armes par la Chine auraient, par ailleurs, entretenu le conflit érythréo-éthiopien (plus d’un milliard de dollars de contrats).

b) L’absence de conditionnalité politique et économique

En échange de contrats et de facilités d’exploitation, la Chine offre aux pays africains des constructions et des financements défiant toute concurrence (aide au développement via des prêts sans intérêt). Les conditions d’octroi des crédits chinois donnent beaucoup plus de possibilités aux pays demandeurs, comparées aux exigences fixées par le Fond Monétaire International par exemple. En effet, contrairement au FMI, la Chine accepte d’octroyer des prêts gagés sur la production pétrolière future d’un pays. En outre, elle n’hésite pas à verser des commissions ou à contourner les appels d’offres en échange de l’obtention de contrats. Elle a, par exemple, financé la résidence de Mugabe (pour 9 millions de dollars) et construit des bâtiments publics au Rwanda, en Centrafrique, au Sénégal, en Ethiopie, au Mali…En fait cela permet aux autorités gouvernementales de ne pas pratiquer la transparence et favorise la corruption. « Cette autre manière de faire du business » (propos de l’ancien ministre rwandais des finances Mr Donald Kaberuka) est très appréciée. D’où l’intérêt de certains pays africains à travailler avec des entreprises chinoises plutôt qu’avec des compagnies occidentales dont les marges d’action se sont resserrées depuis le lancement de campagnes telle que Publish what you pay (Publiez ce que vous payez) visant à plus de transparence financière.

II. …mais un accueil plus mitigé de la population africaine.

a)Les Africains subissent la concurrence chinoise


Le dumping des commerçants chinois qui se sont installés en Afrique provoque des protestations aussi bien en Algérie, qu’au Maroc, au Sénégal et au Cameroun. Les sociétés chinoises qui emploient une main d’œuvre dix fois moins chère concurrencent fortement les entreprises locales. Au Maroc le domaine du textile a enregistré une baisse de 20% de son activité en 2005. Cette baisse s’explique par la fin des quotas sur les produits textiles chinois à destination de l’Union européenne et des Etats-Unis le 1er janvier 2005.
En outre, les compagnies chinoises font venir leurs employés de Chine et n’utilisent pas la main d’œuvre locale, pourtant très touchée par le chômage, et les sous-traitants locaux. En Algérie, les compagnies chinoises de BTP ont fait venir les ouvriers et l’encadrement de Chine qu’elles paient aux normes chinoises. C’est un scandale pour les populations de ces pays qui dénoncent « l’invasion chinoise ». Néanmoins ces protestations ont peu de chance d’être écoutées par les gouvernements car la Chine se charge des contrats de travaux publics à meilleurs prix et sa main d’œuvre est plus compétitive. Ainsi la main d’œuvre se relaie sur les chantiers 24h/24h, travaille 10 à 12 heures par jour avec une journée de repos par mois.


b) Une diaspora peu intégrée


La dernière vague d’immigrés souvent de bas niveau social et avec peu de qualification tend à générer des comportements de rejet. En effet, cette population s’isole pour des raisons culturelles et linguistiques. Dans certains pays, comme en Côte d’Ivoire, la population déteste les Chinois, qui le leur rendent bien, et certains intellectuels et journalistes africains crient au « péril jaune ».

Ainsi la Chine est bien perçue par les gouvernements africains, signe de cette bonne perception : la plupart des pays africains éprouvent le besoin de se rapprocher de la Chine malgré les largesses financières de Taiwan. À ce jour, Taiwan entretient des relations diplomatiques avec 5 pays africains : le Burkina Faso, la Gambie, São Tomé et Principe et le Swaziland. Les discours chinois font toujours référence au principe « gagnant-gagnant » même si cette rhétorique politique pourrait s’avérer n’être qu’une illusion pour les pays africains. La Chine achetant des matières premières africaines pour revendre à l'Afrique des produits manufacturés, le solde des balances commerciales des pays africains se creuse inexorablement et les productions nationales africaines sont sérieusement concurrencées sur le marché intérieur. Pour Chris Alden, chercheur à la London School of Economics and Political Science, spécialiste des relations Chine-Afrique : « Accuser la Chine de néocolonialisme vient surtout d’un Occident très troublé par l’émergence d’une nouvelle puissance mondiale qui veut prendre sa place commerciale sur un continent africain dominé depuis des siècles par les seuls Occidentaux ».

Source : Le Figaro / APA / SLG

lundi 5 octobre 2009

Casamance (Sénégal) : autopsie d'une rébellion


Les faits : Vendredi une attaque contre un véhicule militaire a fait 6 morts et trois blessés en Casamance. Il s'agit des plus lourdes pertes subies par l’armée sénégalaise depuis trois ans. Les autorités mettent en cause les indépendantistes du Mouvement des forces démocratiques de la Casamance (MFDC). Une recrudescence des violences est observable depuis le mois d’août.

Explication géopolitique : Au sud au Sénégal, isolée du reste du pays par l’enclave de la Gambie et par ses religions (animiste ou chrétienne), la Casamance (800 000 habitants s’étendant sur 29 000 km²) est la région la plus riche du pays.
Une rébellion y éclate en 1982 à la suite de la répression sanglante d’une manifestation. Les phases les plus sanglantes du combat ont eu lieu au début des années 1990, faisant plusieurs centaines de morts. Les indépendantistes dénoncent la marginalisation de leur région écartée des bénéfices de l’agriculture et du tourisme au profit des musulmans du Nord. Mais pour l’Etat sénégalais, l’indépendance n’est pas négociable.
Aujourd’hui, l'opinion sénégalaise se lasse de cette rébellion qui s'est criminalisée au fil des années. L'environnement sous-régional du conflit s'est modifié au profit du Sénégal : le changement de gouvernement en Guinée–Bissau a privé la rébellion de son principal soutien. De plus, la forte présence de troupes de l’ONU dans les pays voisins rend plus difficile la circulation des armes et des combattants.